
Science-fiction & Fantasy : Reflets de Notre Monde
Pourquoi lire de la science-fiction et de la fantasy ? Cette question, Jérôme Vincent, éditeur chez ActuSF, l’explore avec passion dans son livre « 27 raisons de lire de la science-fiction et de la fantasy ». Mais derrière le plaisir évident de l’évasion, se cache-t-il un véritable pouvoir de compréhension du monde ?
Le Plaisir et la Révélation du Réel
Le plaisir de s’évader dans des mondes lointains et imaginaires est indéniable. Qui n’a jamais cherché cette « dose » de sensations fortes, cette « épiphanie » que seul un livre peut offrir ?. Pourtant, ces littératures de l’imaginaire offrent bien plus qu’une simple échappatoire ; elles fournissent de véritables clés pour discuter et comprendre notre monde.
Ces œuvres, dites « non mimétiques », ne se contentent pas d’imiter le réel. Au contraire, elles le déforment pour mieux en parler, abordant la politique, les systèmes sociaux et l’humanité elle-même. La science-fiction, par exemple, parle toujours d’aujourd’hui, loin de toute futurologie prédictive. C’est un puissant effet de « distanciation », un miroir grossissant de notre réalité. Pensez à « 1984 » qui reflète de manière éclatante les travers du nazisme et de l’empire soviétique. Ainsi, en grossissant un problème, l’imaginaire nous pousse à nous poser des questions essentielles sur nous-mêmes et notre société.
Naviguer les Genres : Fantasy, Fantastique, Science-Fiction
Les frontières entre les genres sont souvent allègrement franchies par les auteurs, mais des distinctions existent. La fantasy nous transporte généralement dans un Moyen-Âge fantasmé, peuplé de dragons, chevaliers et magie, à l’image du « Seigneur des Anneaux ». Le fantastique, lui, ancre le surnaturel dans notre monde contemporain, qu’il s’agisse de fantômes ou de golems.
La science-fiction, pour sa part, explore le futur, qu’il soit lointain comme « Star Wars » ou à portée de main, dans deux ou trois ans seulement. Ces trois grandes familles, bien que distinctes par leurs origines littéraires, sont regroupées sous l’appellation « littératures de l’imaginaire » car elles partagent cette nature non-mimétique. D’ailleurs, on peut aisément les mélanger, créant par exemple de la science-fiction teintée de fantasy.
L’Imaginaire, Reflet Mouvant de Son Temps
Ces littératures évoluent constamment, marquant les interrogations de chaque époque. La Guerre Froide a vu fleurir les récits d’apocalypse atomique, tandis que l’essor de l’informatique a engendré le cyberpunk. Aujourd’hui, une science-fiction écologique monte en puissance, reflétant nos préoccupations environnementales.
Les auteurs sont inévitablement influencés par leur temps, même inconsciemment. Lovecraft, bien que se revendiquant du 18e siècle, a traversé les thématiques de son début de 20e siècle, comme la méfiance envers les villes. La fantasy également se réinvente, s’inscrivant dans de nouveaux courants et revisitant des mythes, souvent sous un angle féministe. Des icônes comme Tolkien ou Harry Potter sont devenues des marqueurs indépassables. Mais cette relecture nous permet de redécouvrir des œuvres anciennes, en y appliquant une « grille de lecture » moderne, comme celle des années 2020, pour y trouver de nouvelles significations.
Adaptations : Chance ou Compétition pour la Lecture ?
Des œuvres comme « Dune » ou « Le Seigneur des Anneaux » conservent un attrait actuel, souvent grâce aux adaptations médiatiques. Films, séries, jeux vidéo, bandes dessinées… ces univers s’étendent et se nourrissent mutuellement. Pensez à « Les Anneaux de Pouvoir » qui relance l’intérêt pour Tolkien, même si la série peut être critiquée.
Ces adaptations contribuent à la popularité des références et à leur pérennité. Mais la question demeure : amènent-elles un nouveau public vers la lecture des livres originaux ?. Jérôme Vincent est sceptique, soulignant que « le ruissellement ça ne marche pas ». Les livres Star Wars bénéficient aux livres Star Wars, et encore.
Les chiffres d’édition le confirment : même pour George R.R. Martin, les ventes de livres représentaient une infime fraction de l’audience de « Game of Thrones ». La concurrence des loisirs – plateformes de streaming, jeux vidéo, téléphones – est féroce. La lecture, sans boutons et moins partageable, lutte pour sa place dans notre consommation culturelle.
Novellas et Nouveaux Défis : L’Imaginaire se Réinvente
Alors que les sagas de « 3000 pages » étaient la norme, une nouvelle tendance émerge : la novella. Ces formats courts, entre 100 et 200 pages, demandent concision et précision aux auteurs. ActuSF a d’ailleurs reçu 240 propositions pour son appel à manuscrits de novellas SF, preuve de cet engouement.
Ce format plus accessible pourrait-il attirer de nouveaux lecteurs ? Les éditeurs, eux, font face à des défis économiques importants, notamment la surproduction et la visibilité. Il est difficile de sortir les « littératures de l’imaginaire » de leurs « cases », malgré leur pertinence sociétale. Pourtant, l’imaginaire n’est pas « mal aimé » ; il souffre plutôt d’une « méconnaissance ». Des auteurs comme Alain Damasio vendent plus de 100 000 exemplaires. Des festivals dédiés cartonnent, comme les Utopiales avec 140 000 entrées. L’imaginaire est bien là, vibrant, mais sa reconnaissance générale reste un combat.
Finalement, lire de la science-fiction et de la fantasy est une invitation à une aventure intellectuelle et émotionnelle, un moyen puissant de se questionner, de s’émerveiller et de décoder notre réalité.
3 raisons (parmi d’autres) de lire ce Manifeste
- Découverte exhaustive – 27 chapitres, 19 interviews pour explorer l’imaginaire.
- Lecture accessible – Conçu pour novices et experts, sans examen final.
- Vision d’éditeur – Un manifeste pour comprendre l’imaginaire actuel.
Lien partenaire Amazon – la commission soutient financièrement LaBoîte.