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Gorian Delpâture traduit Lovecraft de Cthulhu à Dunwich

H. P. Lovecraft passionne toujours les lecteurs francophones, mais un détail intrigue : comment expliquer les écarts parfois énormes entre ses textes originaux et leurs versions traduites ? Le journaliste et chroniqueur littéraire Gorian Delpâture s’est plongé dans les différentes éditions françaises… et y a découvert un fossé inattendu. Sa conclusion : le style unique de Lovecraft a longtemps été trahi, parfois involontairement, parfois par excès de zèle.

La Pléiade comme révélateur : un choc de non-fidélité

Grand lecteur de Stephen King, habitué à comparer les versions françaises et américaines, Gorian Delpâture s’est replongé dans Lovecraft via la prestigieuse édition de la Pléiade. Surprise : cette traduction, comme trois autres qu’il possédait (Robert Laffont, Mnémos, Bragelonne), ne collait pas au texte d’origine.
Même des mots simples changeaient : océan devenait mer, island devenait îlot. Plus troublant encore, certains sens étaient inversés : merciful devenait pitoyable.

De quoi pousser le journaliste belge à tenter l’expérience lui-même : il se met à traduire L’Appel de Cthulhu “pour le plaisir”, curieux de découvrir s’il est possible d’être fidèle à Lovecraft.

Le rythme sacrifié : ces points-virgules oubliés

La ponctuation chez Lovecraft n’est pas un détail : c’est sa musique, son souffle.
Très peu de virgules, beaucoup de points-virgules, et des phrases-façades qui semblent tenir par miracle.

Or, en français, nombre de traductions ont lissé ce rythme, le simplifiant ou le découpant pour le rendre plus “literary”. Résultat : la voix de Lovecraft disparaît.

Autre découverte : le niveau d’anglais de Lovecraft est beaucoup plus accessible que ce que laissent croire les traductions françaises. Par une volonté de “nobiliser” son style, les traducteurs historiques l’ont souvent rendu plus complexe qu’il ne l’était.

L’Horreur de Dunwich : un texte vraiment trop choquant ?

Lovecraft considérait L’Horreur de Dunwich comme l’une de ses nouvelles les plus terrifiantes. Il craignait même qu’elle soit refusée par Weird Tales, pourtant habitué au pire. Pourquoi ?

L’histoire se déroule dans un village dégénéré de Nouvelle-Angleterre, gangrené par la consanguinité. Elle raconte un accouplement monstrueux entre une jeune femme albinos du village et une entité venue d’ailleurs. De cette union naît l’Horreur elle-même.

Un thème osé, même pour un pulp magazine des années 20.

L’horreur cosmique : une peur sans dieux ni démons

Lovecraft, athée et passionné d’astronomie, crée un genre nouveau : l’épouvante cosmique matérialiste.
Ici, pas de diable, pas de punition divine, pas d’au-delà : seulement des forces venues d’autres dimensions, indifférentes à l’humanité.

La véritable terreur lovecraftienne repose sur une idée simple :

Nous ne sommes rien. Nous vivons sur un « atome de boue ».

Les créatures lovecraftiennes ne veulent même pas nous détruire : nous leur sommes insignifiants.

Le problème du racisme : traduire ou corriger ?

Lovecraft était profondément raciste et xénophobe, comme beaucoup d’écrivains américains de son époque, même si ses opinions s’adoucissent légèrement vers la fin de sa vie. Son œuvre porte clairement cette marque : il utilise le mot “nègre”, décrit de manière dépréciative certaines populations immigrées et évoque des quartiers urbains “qui sentent mauvais”.

Gorian Delpâture refuse de corriger ces passages, estimant que traduire n’est pas censurer. Pour lui, il est essentiel de restituer le texte tel qu’il a été écrit, même si cela peut mettre le lecteur mal à l’aise.

Il s’agit d’un racisme de peur et d’imaginaire plus que d’un positionnement politique, car Lovecraft n’a jamais défendu d’agenda idéologique.

Lovecraft peut-il encore faire peur ?

Plus que jamais.
Son ambiance désuète, mêlée à cette philosophie de l’insignifiance humaine, fonctionne toujours. L’influence du mythe de Cthulhu est partout :
jeux de rôle, littérature, comics, Metallica, Stephen King, ou même Gotham, inspirée de la ville fictive d’Arkham.

La quête de fidélité entreprise par Gorian Delpâture permet de redécouvrir un Lovecraft plus simple, plus drôle, plus vivant qu’on ne l’imaginait — un auteur capable d’inventer des mots comme “Yogsototeries” pour décrire ses créatures.

Un Lovecraft moins embourbé dans la grandiloquence des traductions historiques… au plus proche de ce qu’il était vraiment.

Redécouvrir Lovecraft, c’est aussi redécouvrir ce qui fait vraiment peur.

3 raisons (parmi d’autres) de lire Lovecraft

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